22 avril 2007

Prise 2

En relisant les textes que j’ai publiés ici, je me rends compte que les sujets de deux d’entre eux font encore l’actualité: Tuer son prochain et Écroulement .

J’ai un peu fermé les yeux sur les deux, volontairement. Parce que je n’ai pas envie de penser qu’un de ces jours, ma fille fréquentera un collège ou une université où n’importe qui pourra franchir les portes, sans autorisation, armé jusqu’aux dents. Que cet homme (pardon, mais il s’agit toujours d’un homme) aura la possibilité de tuer dix, vingt, trente, quarante ou cent personnes (pardon, mais le nombre augmente toujours) sans être arrêté.

Qu’on publiera des photos de cet homme dans tous les journaux, sur tous les réseaux, comme celles d’un héros armé qui joue à Rambo sur le grand écran.

Que d’autres suivront son exemple, parce qu’ils auront compris que c’est une façon terriblement efficace d’attirer l’attention, et que dans leur démence c’est ce qu’ils cherchent avant tout sans penser aux conséquences.

J’ai aussi fermé les yeux pour ne pas revoir la scène du viaduc écroulé. Je me suis bouché les oreilles pour ne pas entendre les discours des politiciens qui d’un côté affirment que tous les viaducs ont été vérifiés et sont sécuritaires, et de l’autre annoncent qu’une quinzaine d’entre eux devront être démolis prochainement ??? Ne me demandez pas pourquoi j’ai de gros frissons chaque fois que je passe sous un viaduc, svp.

Et je n’ai pas envie, non plus, d’écrire au sujet du réchauffement de la planète. Une seule phrase, peut-être : « Nous sommes tous interdépendants et le moindre geste posé par l’un d’entre nous contribue à faire pencher la balance, du bon ou du mauvais côté. » C’est ce que je crois, bien humblement. À nous de trouver l’équilibre.

01 avril 2007

Copier c'est voler


« Ce qui est déshonorant, ce n’est pas de mentir, c’est de se faire prendre en flagrant délit de mensonge », écrivait Étienne Rey dans son Éloge du mensonge. En matière de mensonge, celui qu’a commis la jeune Marie-Pier Côté, récemment accusée de plagiat, en est un de taille. On se demande bien ce qu’elle avait en tête lorsqu’elle a présenté « son » manuscrit d’abord à ses parents, puis à un éditeur qui l’a finalement publié. Démasquée, l’adolescente a été forcée d’admettre qu’elle a trompé tout le monde en volant l’œuvre de quelqu’un d’autre sur Internet.

La Presse sème le doute, les fans s’en doutent

Le roman intitulé Laura l’immortelle, publié aux éditions Les Intouchables en janvier 2007, a d’abord suscité les interrogations des fans du film Highlander, à cause des nombreuses similitudes entre les deux histoires. La Presse en avait d’ailleurs fait état dans un article publié le 13 mars 2007. À la suite de cet article, ce sont les discussions des fans sur les différents forums qui ont éveillé les soupçons de l’auteur de la fanfiction Des cendres et du vent, Frédéric Jeorge, qui a publié son récit sur Internet en 2001. Après la lecture du roman de la jeune fille de 12 ans, l’auteur n’a pu que constater qu’il s’agissait d’une copie conforme de son œuvre et a décidé d’alerter les médias.

L’éditeur

Michel Brûlé est un éditeur audacieux qui n’a pas très bonne réputation dans les milieux littéraires. Croyait-il avoir affaire à un jeune prodige lorsqu’on lui a présenté la petite fille et son gros bouquin de plus de 200 pages ? S’est-il interrogé sérieusement ? A-t-il fait des recherches ? A-t-il soumis le manuscrit à d’autres personnes pour connaître leur avis ? Ou a-t-il tout simplement cru qu’une bonne fée, d’un coup de baguette magique, pouvait transformer une fillette en auteur à succès ?

Brûlé l’a avoué lui-même, il n’a pas lu entièrement le manuscrit et a cru à la bonne foi de Marie-Pier et de ses parents qui lui ont confirmé qu’il s’agissait bien d’une œuvre originale. Sans aller plus loin, il a accepté de publier Laura l’immortelle, et jette aujourd’hui sur les parents tout le poids de la responsabilité.

La réaction de l’éditeur étonne, car il ne semble en aucun cas remettre en cause son propre comportement dans ce dossier, son manque de jugement et, oserait-on dire, sa grande naïveté. En tant qu’adulte et professionnel de l’édition, n’aurait-il pas dû émettre des doutes sur la capacité d’une si jeune personne à produire un tel ouvrage sans aide? Sa responsabilité demeure considérable dans cette histoire et il serait dommage qu’on le laisse s’en tirer aussi facilement. D’ailleurs, la somme qu’il réclame aux parents à titre de remboursement et de dédommagement – autour de 30,000 dollars – semble passablement exagérée, compte tenu du faible tirage.

Les parents

Ne généralisons pas. Les parents ne rêvent pas tous de faire de leur progéniture des champions olympiques ou des vedettes de cinéma ni de les voir réaliser des performances exceptionnelles dans tous les domaines. Mais quand un parent décèle certaines aptitudes chez son enfant, il est normal qu’il prenne les dispositions nécessaires pour que celui-ci réalise son plein potentiel. Dans ce dossier, certains ont fait les gros yeux aux parents de Marie-Pier Côté qui auraient, dit-on, cru aveuglément au mensonge de leur fille. Mais doivent-ils réellement payer un tel prix pour cette erreur, puisqu’au fond ils ne sont coupables de rien, sauf d’avoir encouragé le talent de leur fille ?


Le mensonge

Combien d’étudiants remettent des thèses entièrement copiées sur Internet ? Combien d’adolescents rendent des travaux constitués de collages de différents textes glanés sur des sites qu’ils ne se donnent même pas la peine d’inclure dans leurs références ? La facilité avec laquelle quiconque aujourd’hui peut s’approprier un texte d’un simple clic de souris est inquiétante, mais justifie-t-elle le mensonge particulièrement énorme qu’a commis la plagiaire Marie-Pier Côté en s’appropriant l’œuvre d’un autre pour faire croire qu’elle était allée « au bout de son rêve ».

De quoi rêvent les jeunes filles à 12 ans ? De devenir célèbres ? D’attirer l’attention? D’être la fierté de leurs parents ? Si Marie-Pier possède un réel talent d’écriture, aura-t-elle un jour la chance de publier un autre roman ? Combien d’auteurs attendent des réponses d’éditeurs qui demeurent silencieux et qui ne liront peut-être jamais leur manuscrit ? Et ce genre d’histoire n’a rien pour les motiver à lire ceux des jeunes qui rêvent d’être publiés…


P.S. J’aurais bien publié cette chronique un peu plus tôt, mais je devais d’abord m’assurer qu’elle soit acheminée au professeur à qui je devais la remettre. En effet, il s’agit d’un sujet que j’ai choisi comme exercice de rédaction dans le cadre d’un cours que je termine bientôt. Vous comprendrez que je n’aurais surtout pas souhaité être accusée d’avoir copié…