24 janvier 2009

La tête sous l'oreiller

Un gentil petit théâtre que La Licorne. Déjà bondé lorsque nous sommes arrivés, mon copain et moi, essoufflés d’avoir galopé par ce soir de grand froid, craignant d’être en retard parce que nous avions stationné la voiture trop loin. Pour ne pas nous séparer, nous voilà obligés de nous installer à la toute dernière rangée. Pas grave, la salle est petite et la scène est bien visible. La dame à côté de moi sirote un verre de rouge bas de gamme, l’odeur de l’alcool me donne un peu mal au cœur.

Ce soir-là, donc, dans ce gentil petit théâtre, les comédiens joueront une pièce qui nous aura secoués. Quelques spectateurs quittent la salle dès le début, secoués. C’est que l’histoire qu’on nous raconte n’est pas un jeu d’enfant.

Il était une fois… Les comédiens ont le mérite de rendre le texte – trop long, inégal, ennuyant par moment et dont le cynisme douteux peut choquer gravement – pas trop pénible à supporter. Mais le propos lui, se digère un peu mal. Même très mal.

Entendons-nous. Les critiques semblent unanimes. La pièce a d’ailleurs été couronnée de prix prestigieux à Londres et à New York. Mais la spectatrice que je suis, non rompue à ce genre de spectacle (je l’avoue, je ne vais pas au théâtre très souvent), a subi un choc et est ressortie avec un gros sac de points d’interrogation. Sac qui est loin d’être vidé d’ailleurs. Lire les critiques ne m’a pas aidée. En discuter avec mes amies a été beaucoup plus éclairant.

Ce qui m’a dérangée : qu’on nous invite à rire de sujets aussi tragiques que la mort d’un enfant, la torture, l’humiliation, la naïveté d’un adulte un peu arriéré, l’agression d’enfants…

Ce qui m’a plu : le jeu des comédiens qui défendent très bien cette pièce, Le Pillowman, particulièrement Frédéric Blanchette, que je viens de découvrir.

Bon, j’ai été déçue. Mais je pense que cette pièce mérite qu’on s’y attarde. Elle mérite qu’on l’étudie et qu’on y réfléchisse, mais pas sur l’oreiller…


Le Pillowman,
de Martin McDonagh, mise en scène de Denis Bernard, avec Antoine Bertrand, Frédéric Blanchette, David Boutin, Daniel Gadouas et Marie-Ève Milot. Au Théâtre La Licorne jusqu'au 21 février.

11 janvier 2009

C'était pour rire

Je sais que tout le monde en a parlé, mais je ne sais pas ce que tout le monde en a dit. Mais ce que j’ai entendu ou lu à propos du Bye Bye 2008 m’a terriblement agacée. On dirait que tout le monde attend cette foutue émission de fin d’année pour sauter sur leur clavier ou sur leur téléphone pour écrire ou dire des niaiseries à propos de ce qu’ils ont vu et entendu à cette seule émission. Alors qu’à l’année longue, les humoristes crachent leur venin sur les artistes, les politiciens, les journalistes, les Noirs, les handicapés, les femmes, les couples, et même sur le malheur des gens. Nommez-moi un humoriste qui ne s’alimente pas presque uniquement à même l’actualité pour se promener d’un côté de la scène à l’autre en répétant ce qu’un autre humoriste a dit une semaine avant lui, en changeant une ou deux phrases pour avoir l’air intelligent. (Oui, il y en a, mais on peut les compter sur les doigts d’une seule main.)

Le métier d’humoriste est un métier que je ne voudrais pas pratiquer. Non seulement on doit faire rire les gens, mais on doit aussi ménager les susceptibilités tout en n’étant pas trop plate. Les Bye Bye se suivent mais ne se ressemblent pas, et c’est tant mieux comme ça. Mais ces émissions ont une chose en commun, elles ont toutes été vertement critiquées et n’ont jamais fait l’unanimité. De là à faire un procès à une jeune équipe qui ne demandait qu’à tenter sa chance en relevant un beau gros défi, c’est suffisant pour décourager tous les jeunes humoristes encore assis sur les bancs de l’École de l’humour. La question n’est plus de savoir ce qui est drôle ou pas, ce qui se dit ou ne se dit pas, ce qui se fait ou ne se fait pas, la question est de savoir qui a intérêt à tasser les jeunes de la grande table de l’humour qui est déjà, à mon avis, bien trop pleine.

Moi, j’ai ri, un peu, le soir du Bye Bye. Mon chum a ri plus que moi. Je ne ris pas facilement et je ne ris pas de n’importe quoi ou de n’importe qui. Mais je ne ris plus quand je vois Louis Morissette et Véronique Cloutier, les yeux cernés, forcés à s’excuser parce qu’ils ont offensé quelques personnes, alors que bien d’autres avant eux ont été passablement plus cruels, déplacés, carrément moins drôles. Moi, je les félicite pour leur courage et leur travail et j’espère qu’ils vont continuer à faire rire ceux qui ont le sens, le vrai sens de l’humour. Pour les autres, ils n’ont qu’à changer de poste.